Ce matin Andrew ne savait pas quoi faire. Il était encore en caleçon lorsque Joe entrait dans sa chambre en hurlant :

-Eh écoute ça ! Ce soir j’t’emmène en boîte !

Le jeune homme grommela et enfila son jean. Il écoutait son meilleur ami se réjouir de la soirée qu’il avait prévu. Pourtant il était au courant qu’Andrew détestait aller en discothèque. Surtout qu’il avait prévu de réviser aujourd’hui, pour le devoir de la semaine qui allait suivre. Mais il n’était pas aussi têtu que son ami et avait fini par céder, enfilant sa chemise et le laissant s’installer pour se brosser les dents ainsi que les cheveux. Sans oublier la touche du parfum « Playboy », comme à l’habituel.

C’était de cette façon qu’il s’était retrouvé le soir-même en boîte de nuit avec son meilleur ami. Il s’était vêtu d’une chemise noire et d’un jean presque slim, ainsi que des baskets propres. Il était assis au bar, buvant une canette de coca-cola. Il regardait les jeunes filles se trémousser sur la piste de danse, et son meilleur pote qui dansait avec l’une d’entre elles. Il soupira. Il s’ennuyait énormément. Il aurait tant voulu rester dans sa chambre pour lire ou regarder la télévision. Les soirées n’étaient sérieusement pas son truc, et encore moins lorsqu’une fille venait le chercher pour qu’il danse. Il se laissa tout de même faire et dansa quelques minutes avec cette brunette, se forçant de sourire, avant de revenir s’asseoir. Certes elle était jolie mais il n’avait pas envie de s’amuser.

Alors il se leva et traversa gentiment la foule pour aller dehors. Là il s’adossa dans un coin sombre contre le mur et se dépêcha de sortir une cigarette. Il l’alluma vivement et la porta à la bouche pour fumer. Il regardait les gens se bousculer pour rentrer à l’intérieur. Décidément il ne comprendrait jamais pourquoi les gens tenaient tant à aller danser. De plus la musique n’était pas à son goût. Il préférait de loin la musique classique. Le piano, le violon, tout ça c’était son truc. Il se forgeait un monde autour de ça. Il voulait vivre de ça, ne penser qu'à ça. Il voulait en faire son plus grand avenir, et trouver une femme qui la comprenne.

Il jeta vulgairement sa cigarette sur le sol et l'écrasa, rejetant de ses poumons la fumée qu'il restait. Il se dirigea vers la porte  et passa devant quelques personnes pour retourner vers le bar. Il s'ennuyait vraiment à mourir, mais s'il partait son ami allait lui en vouloir. Il s'assit donc et commanda une nouvelle canette de soda pour boire un peu, histoire de se dé-sécher la gorge. Il attendit quelques minutes en regardant la foule, étant vraiment seul.

Je regardais fixement le plafond, le paquet entre les doigts. Il était rouge, carré, et un ruban doré l'entourait. J'étais fière, pour une fois que je faisais un paquet cadeau correctement. J'espère qu'elle serait contente. Je m'étais démenée pour lui trouver son cadeau. C'était un collier avec une perle en diamant et un bracelet en argent. J'avais flashé sur ce bracelet, et je l'avais également acheté pour moi. Cette journée promettait d'être géniale, à une exception près. Elle avait décidé de nous emmener ce soir à la discothèque. Moi en boite ? Je déteste ces lieux trop bondés où les gens se marchent dessus tellement ils y sont nombreux. Deuxième problème, je ne bois pas en présence d'inconnus, donc je resterai au bar, un peu comme une sorte de Sam, sauf qu'on conduira pas. Après avoir accompagné toutes mes amies le jour de leur anniversaire, le barman commençait à me connaitre et on se tapait souvent la discut. Il était charmant et me trouvait toujours un petit diabolo pêche ou grenadine, avec deux glaçons.

"-Allez Anna viens !
- Non je viendrais pas, j'ai du travail.
- Ce sera pas drôle sans toi.
- Vous vous amuserez tout autant sans moi.
-Mais c'est mon anniversaire ! Tu peux pas me faire ça !"

Pas drôle sans moi, elle rigole j'espère, elle sait très bien qu'elle et les deux autres seront au milieu de la piste, à se déhancher devant un gars inconnu sur lequel elles auraient jetés leur dévolu. Après tout elles avaient de quoi, elle était belle. Je veux pas aller en boite, bien sur que je n'ai pas de travail, j'ai juste pas envie d'y mettre les pieds et elle savait très bien que je tentais à la dernière minute d'y échapper. Il ne manquait plus que le je n'ai rien à me mettre, mais c'était totalement faux aussi. C'est mon anniv, la phrase qui tue, après ça ne je pouvais qu'accepter. Je la regardais avec un regard de chien battu, les deux autres derrière, plantées devant mon armoire. J'acquiesçais, que voulez vous que je fasse d'autres, moi contre ces trois filles, qui me trainent là bas depuis qu'elles en ont l'âge et que je sais mentir.

J'enfilais une robe noire qui m'arrivait au dessus du genou, même carrément au dessus, avec une ceinture blanche en ruban qui terminait en un nœud. Chaussée de petits escarpins noirs, je coiffais ma chevelure blonde mais gardait un élastique au cas où j'aurais trop chaud dans cette fournaise. Contre toute attente, je fus obligée de porter un collier. J'en choisis donc un simple, en argent, avec une perle noire scintillante au bout. Je mis un quelque peu de mascara "pour allonger les cils" comme elles disent. Me regardant dans le miroir je ne me reconnaissait plus. Moi qui avait l'habitude des jeans et des tee shirt, sans parler du fait que je ne me maquille jamais. Elle avait voulu me faire plaisir, et, portant également le bracelet en argent et le collier, elle me disait qu'elles ne m'avaient jamais vues aussi belle. Du bluff bien sur.

Nous arrivions à l'entrée de la boite de nuit. Le videur me regarda, mais me laissa entrer. Heureusement que je suis grande en taille parce que sinon... Je pouvais rêver pour passer. Les gens se pressaient autour de nous pour entrer en une énorme masse dans cet endroit que je ne voulais que fuir. A peine entrée je vis mes amies se diriger vers la piste de danse où elles se dégoteraient surement un mec potable pour la soirée, qu'elles lâcheraient ensuite en leur donnant un faux numéro. Après tout, elles font toujours ça puisqu'elles le peuvent. Elles sont assez grandes, toute mince, bien foutues et belles alors. Avec des jupes et robes trop courtes et des décolletés plongeant elles font ce qu'elle veulent. Je me trainais jusqu'au bar. Arrivée là bas je demandais un diabolo pêche et me cala dans l'angle, près du mur, là où je serais tranquille. Regardant les gens, j'essayais de percevoir certaines personnes que je connaissais. Mais dans cet endroit sombre, impossible de distinguer qui est qui.

Puis d'un coup, alors qu'il ne s'y attendait pas un groupe de belles jeunes filles entra. Il les observa et remarqua que celles-ci étaient à l'Académie. Dont une fille à laquelle il s’intéressait tout particulièrement. Mais il s'était contenté de l'observer pendant tellement de temps qu'il n'avait même pas pensé à aller lui dire bonjour. Elle lui inspirait tant de choses. Et là, il la trouvait vraiment magnifique dans sa petite robe noire et ses escarpins.

*Mais elle n'a pas l'âge de venir ici ?* était la première pensée qu'il lui était venue. A ce moment, il aurait tant voulu passer sa main dans ses cheveux blonds, et plonger son regard dans le sien. Mais Andrew avait des règles ainsi que des principes, et il se sentait obligé de les respecter, c'était comme ça depuis qu'il était tout jeune encore. Puis finalement, il vida d'une traite sa bouteille et la laissa passer seule devant lui pour qu'elle aille se réfugier seule dans un coin. *Elle non plus n'aime pas cet endroit ?*. Malgré les pensées, il continua de l'épier, lançant des regards à son ami qui dansait et rigolait avec une charmante jeune fille. Son meilleur ami se stoppa un instant pour venir le rejoindre.

-Alors mon pote, on s'éclate ?
-Oh oui, on s'éclate à te regarder danser avec une nana.
-Oh allez vens danser tu fais pitié là !
-Ta gueule.
-Ok c'est bon j'ai compris. Pourquoi tu vas pas voir la fille que tu regardes depuis tout à l'heure ?
-Je ne vois pas de quoi tu parles.

Son ami but une gorgée de bière et parti d'un rire fou. Andrew ne comprenait pas pourquoi son meilleur ami était comme ça. Toujours à traîner avec les autres pour rien. Mais il ne s'interrogea pas plus, lorsqu'il remarqua qu'une homme un peu trop ivre s'approchait de "Cendrillon" [Oui, il avait beau la voir de loin depuis longtemps, il ne connaissait même pas son prénom. Il se leva de suite et se précipita vers elle et le gars qui voulait sûrement emmener la fille dans un endroit sombre pour faire on ne sait quoi. Certes, il aurait pu attendre là à attendre qu'elle crie, mais il n'avait pas pu résisté à la tentation. Il adressa la parole à l'homme en l'attrapant par les épaules et en le plaquant contre le mur à côté:

-Dis-donc toi, on t'as jamais appris à traiter les filles d'une autre façon que ça ?
-Uh... Baah.. De quoi ? Répondit le bourré.

Andrew, conscient que quelques regards étaient tournés vers eux, se retint d'assommer l'homme de coups. Il le relâcha et lui fit signe de partir, l'avertissement que s'il recommençait il allait appeler la police pour une raison bien valable. Le jeune homme se tourna vers la blonde et s'approcha, lui souriant un peu.

-Il ne t'as rien fait j'espère ?

Il s'installa sur une chaise à côté, et commanda deux sodas au barman. Il voulait rester avec elle un peu de temps, pour non seulement la surveiller mais aussi pour faire connaissance. Depuis le temps qu'il rêvait lui adresser un peu la parole... Il n'avait pas pu résister. Le barman leur donna les sodas demandés, et Andrew ouvrit les deux canettes avant de boire un peu dans la sienne.

Je sirotais tranquillement mon diabolo en regardant les gens danser. Lorsqu'il avait un moment, Martin, le barman, venait me voir pour discuter un peu. Il me demandait ce que je faisais ici alors que je semblais m'ennuyer. Je l'aime bien Martin, il me comprend et me fait rire. Parfois on commentait tout, sans cesser de regarder les autres. La dernière fois, je l'avais même aidé au bar, parce que ça me rendais joyeuse de rester avec lui, parce qu'il était marrant. Il est vieux, enfin lorsque je dis vieux, la quarantaine au moins, c'est un peu comme mon oncle. *Ils ne savent pas danser* Pensais je. En même temps j'étais une Cygne, assez bien placée pour dire ça des autres. Mais de là à se tremousser comme pas possible à tenter des pas qu'ils ne parviendront surement jamais à exécuter, c'est stupide. Derrière, un peu plus loin, des garçons se faisaient une battle de break dance. Je les fixais. J'aimerais bien me joindre à eux pour leur montrer comment moi j'en fais. Après tout c'est mon style de danse favoris. Mais ce n'était que des hommes, et je n'en connaissais aucun. Parfois il vaut mieux rester dans son coin.

Reportant mon regard sur les filles, j'en vis une aux prises avec deux garçons qui se tapaient limite pour savoir lequel aurait droit à la prochaine danse. J'haussais les épaules mais ne pu réprimer un sourire. Elles sont vraiment grave. Faudra que je leur raconte demain, lorsqu'elles ne se souviendront plus de rien à force de se bourrer la gueule. Je gardais ces informations dans un coin de ma tête. Ayant fini mon diabolo, je posais le verre vide sur le bar lorsqu'un homme bizarre se dirigea vers moi. Reculant je me heurtais au mur. Il était désormais face à moi et me pris le bras en me disant qu'il allait m'emmener au paradis. Son haleine empestait mais il avait plus de force que moi. Je résistais tant bien que mal lorsqu'un garçon arriva et le plaqua contre le mur. J'en restais estomaquée. Dire qu'il y a un instant j'ai failli être emmenée par un bourré surement pervers et qui m'aurait si ça se trouve assassinée et maintenant un beau garçon le maitrisait, pour moi, tel un prince charmant. Je le regardais, sa tête me disait quelque chose. Je me mis à réfléchir. L'académie. Il était à l'académie.

-Dis-donc toi, on t'as jamais appris à traiter les filles d'une autre façon que ça ?
-Uh... Baah.. De quoi ? Répondit l'homme déboussolé.

Ah, il ne devait pas s'attendre à un truc de ce genre. Le garçon revint vers moi en souriant après avoir dit au gars de dégagé et surement de ne plus trainer autour des jeunes filles comme il le faisait. Plus il s'éloignait, mieux que je me sentais. Ce gars là était vraiment bizarre. Le jeune se tourna vers le barman et lui demanda deux sodas. Martin les apporta non sans me faire un clin d'œil au passage. Je lui souris, il savait que je n'étais pas comme mes amies mais il ne pouvait s'empêcher de me taquiner à chaque fois qu'un garçon venait me parler.

"-Il ne t'as rien fait j'espère ?"

Ce jeune homme semblait vraiment se soucier de mon état. Je le regardais, il avait pris place sur un tabouret à côté de moi et avait ouvert sa canette, ayant bu une gorgée du liquide gazeux il m'interrogea du regard. Je remis une mèche de cheveux en place derrière mon oreille et lui dit :

"-Non, grâce à toi. Je te remercie, je ne sais pas ce que j'aurais fait sans toi."

Je n'osais même pas imaginer ce que ce type aurait pû me faire. J'ouvris ma canette et renversais le liquide dans ma gorge. Je souris.

Ils se regardaient l'un l'autre, portant chacun un point de vue différent ou non dans leur tête, un point de vue qui concernait l'autre personne. Andrew était heureux, pour une fois. Heureux d'avoir pu approcher la créature qu'il observait toujours en silence, parfois alors même qu'il était avec son seul ami, son meilleur ami, Joe. Il soupira et but une autre gorgée du soda, tandis que la jeune fille remettait maladroitement une mèche de cheveux derrière son oreille.

"-Non, grâce à toi. Je te remercie, je ne sais pas ce que j'aurais fait sans toi."

*Tu as de la chance que j'ai été là ce soir* pensa t-il. Il la regardait boire et lui rendit son sourire avant de tourner la tête vers la piste de danse en marmonnant "Je ne comprendrais jamais ces personnes qui dansent comme des pieds." Il posa son regard sur Joe, qui ne prêtait désormais qu'attention à la fille qui était avec lui. Notre jeune homme se demanda comment il avait pu apprécier ce mec la première fois. Mais il ne regrettait pas. Et puis au final c'était une bonne idée de venir là, parce qu'il était en train de parler avec cette fille. Joe avait-il fait exprès de l'emmener là pour la lui faire rencontrer ? Andrew n'en savait rien. Il tourna de nouveau son regard vers elle, et profita de ses beaux yeux verts.

-Je m'appelle Andrew. Je t'ai déjà vue plusieurs fois à l'Académie.

*Ouais, je t'ai déjà vue, mais tu n'étais pas aussi belle que là.* Il approcha doucement sa main du visage de la belle pour lui remettre la mèche correctement, trouvant que celle-ci faisait une boucle horrible derrière son oreille. Puis il reposa la main sur la canette pour la bouger un peu dans tous les sens. Il n'avait pas l'habitude de vraiment parler aux gens, et encore moins à une fille de cette manière. Quoi qu'il en soit, il refusait de croire qu'elle avait une dette envers lui. Il lui avait juste évité de tomber enceinte et égorgée dans les toilettes des femmes ou des hommes ou bien même dehors, ce qui serait vraiment répugnant. Et il n'avait pas eu le choix, personne ne prêtait attention aux dangers de la salle, tout le monde danse et se bourre la gueule, et les gardes préfèrent surveiller dehors que dedans. Après tout ils sont là pour gagner du fric.

-Ta mèche était mal mise. Quel est ton joli nom ?

Il l'observait toujours, quand d'un coup une main se posa sur son épaule. Surpris il se retourna en mettant un coup dans la mâchoire de la personne.

-Putain mon pote ça va pas la tête ?! hurla Joe, tétanisé par le coup que son meilleur ami lui avait mis.
-Excuse-moi, mais ne refais jamais ça tu imagines si ça avait été une fille ? répondit Andrew.
-Les filles et toujours les filles. Bon, t'oublies tes principes et tu viens t'amuser ? Lui lança son ami.

Le jeune homme balaya l'offre d'un geste de la main et retourna sur son tabouret. Son pote s'installa à côté et lança un sourire à la fille qu'Andrew avait abordé en premier. Celui-ci soupira et se tourna vers lui en mode "Tu te fous de moi ?". Alors il le regarda retourner draguer une fille sur la piste de danse. *S'il me pique toutes les filles oh, comment vais-je faire ?*

Ses yeux tournèrent de nouveau vers sa connaissance et il s'excusa d'un sourir gêné tout en se grattant la nuque. C'était presque une honte pour lui, comment elle allait réagir ? Il l'ignorait, mais il souhaitait qu'elle ne se lève pas pour fuir en courant. De toute manière si elle faisait ça il se sentirait obligé de la suivre, un peu comme si c'était son garde du corps, bien qu'il déteste ce job. Oui, ça lui avait déjà causé des ennuis il y a quoi, deux ans ? En voulant protéger sa petite amie d'un mec qui l'embrassait, il s'était fait plaqué. Et le mec lui avait déformé le visage. Certes, il ne s'agissait là d'une fille qui ne sortait pas avec lui mais voilà, c'est toujours une histoire de gestes appris dès son plus jeune âge.

Perdu dans des pensées surement plus intéressante que les miennes, il reporta son regard sur le reste de la salle un instant avant de replonger ses yeux dans les miens. Déclinant son identité il m'annonça quelque chose qui me surprit fort.

"-Je m'appelle Andrew. Je t'ai déjà vue plusieurs fois à l'Académie. "

Ah, je ne savais pas qu'il s'était rendu compte de ma présence. Je souris, dévoilant une rangée de dents blanches. Se penchant vers moi, il mit sa main et replaça correctement une mèche rebelle derrière mon oreille. La douceur de ses doigts sur ma peau me fit frissonner. Je réfléchissais, où l'avais je vu, nous étions nous déjà rencontré, parlé ? Non pas que je me souvienne. Je posais ma canette sur le bar et caressais ma montre du bout de la main. Je faisais toujours cela lorsque j'étais stressé, je ne sais pas pourquoi mais toucher le caoutchouc me calmait.

"-Ta mèche était mal mise. Quel est ton joli nom ?"

Ah c'était pour ça. Je souris au "joli nom". J'aimais bien mon nom, mais de là à dire qu'il était beau... Andrew me regardait lorsque je perçus une ombre derrière lui. Je m'apprêtais à le prévenir lorsque la main s'abatit sur son épaule. Je ne savais pas que les garçons avaient de tels réflexes. Néanmoins il envoya son poing dans la machoire de celui qui avait posé sa main sur son épaule. Un peu plus et le crac se serait fait entendre, je reculais quelque peu. Attention !

"-Putain mon pote ça va pas la tête ?! "

Dit l'intéressé en portant la main à sa machoire. Ouche, en plus il venait de cogner sur son pote. J'esquissais un sourire gêné, il devait être aussi stressé que moi pour être autant sur ses gardes comme ça.

"-Excuse-moi, mais ne refais jamais ça tu imagines si ça avait été une fille ? "

Dit Andrew en regardant son pote l'air sincerement désolé. Les filles, il semblait très galant ce garçon. Cette idée m'amusa. Etant gentleman et aussi castagneur, sauveur de jeunes filles en détresse.

"-Les filles et toujours les filles. Bon, t'oublies tes principes et tu viens t'amuser ?"

Répondit son ami en massant toujours sa joue. Principes ? Quels principes ? Cela m'intéressait beaucoup. Balayant d'un geste de la main l'idée pourtant alléchante pour un autre, que son ami venait de proposer, il se retourna vers moi pour continuer la discussion. Prenant un tabouret, l'ami de ma nouvelle connaissance s'accouda au bar et me sourit. Gros dragueur qui passait sa vie à faire tomber les filles sous son charme en boîte. J'hésitais à l'ignorer ou me prêté à son jeu et préférait l'ignorer, outre l'affront que j'aurais fait à Andrew avec qui je discutais jusqu'à maintenant. Grattant sa nuque avec sa main droite, Andrew tentait tant bien que mal d'expliquer à son ami qu'il aimerait bien qu'il nous laisse seul. Retournant draguer je ne sais qui sur la piste, l'inconnu quitta sa place. Jetant un coup d'œil sur la fille qu'il reluquait, je pouffais intérieurement, c'était ma meilleure amie. Intéressant, deux personnes qui draguent et balancent les gens après la nuit à la discothèque. Cela allait être promettant.

"-Moi c'est Anna. Alors comme ça tu as des principes ? Quels sont ils ?"

Demandais je en souriant. Andrew devait être de bonne famille s'il avait des principes. Comme moi. Je savais tellement de choses sur les bonnes choses à faire, celles qu'il ne fallait jamais dire, la courtoisie, les phrases de remerciement. Tout ceci m'avait été doctriné, assimilé tel un médicament à prendre annuellement. Trouver quelqu'un aux même convictions, habitudes, croyances, monde, que le mien n'était pas une mince affaire.

Le jeune homme –Andrew- regarda son ami marcher jusqu’à une brune pour la draguer. Une fois son ami –Joe- dans son petit manège, il tourna la tête vers Anna qui venait de lui poser une question.

"-Moi c'est Anna. Alors comme ça tu as des principes ? Quels sont-ils ?"
Alors comme ça, elle s’y intéressait ? Cette pensé arracha un sourire au brun, qui tourna la tête vers son soda pour le saisir et l’agiter. Il réfléchissait, pensait, songeait. C’était bien rare de nos jours de trouvé quelqu’un qui s’y intéresse. Etait-elle elle-même concernée par ces choses ? Il fallait qu’il le sache. C’était un ordre presque automatiquement donné par son cerveau. Ses yeux se plongèrent dans les beaux yeux de la blonde.

-Eh bien… C’est assez compliqué. Je suis d’une famille de haute bourgeoisie, tu imagines le genre. On m’a implanté dans le cerveau le « pourquoi du comment » se comporter envers telle ou telle personne.

Il marqua une pause dans son récit, le temps de demander un autre soda au barman.

-Par exemple, avec une fille c’est encore plus bordélique que quand je suis avec un gars. Je suis censé ne pas l’embrasser avant d’être sûr d’avoir des sentiments, être sympathique au moins à la rencontre, et même si je ne l’aime pas d’ailleurs, mais être sympa quand je n’apprécie pas la personne, je ne respecte pas. Il avait un ton calme et posait, et essayait de ne pas parler trop vite pour qu’elle le comprenne. Tout comme le principe de parler comme la famille parle, c’est-à-dire à la façon du Moyen-Âge. Or, je ne le fais pas. Je ne l’ai jamais fait en réalité, c’est trop barbant et ça emmène les gens à nous détester.

Il s’arracha un léger sourire, buvant une autre gorgée du soda. Il tourna un long moment la tête vers la foule. La musique était trop forte à son goût pour qu’on puisse l’apprécier, l’éclairage donnait l’impression d’avoir dormi tranquillement avant d’ouvrir directement les yeux vers la lumière. Le tout lui donnait un mal de crâne atroce, mais il se résignait à aller à l’extérieur. Il n’avait pas envie de fumer, alors c’était inutile de sortir. Ses yeux se posèrent de nouveau sur la fille.

-Je te vois regarder les gens faire des battles là-bas, t’as envie d’y aller ?

Il lui souriait. A elle. Il n’avait aucune raison de sourire à une autre fille à vrai dire. Et il voyait bien qu’elle allait se lasser de rester assise ici à ne rien faire. Il voulait qu’elle bouge un peu, alors il se leva et lui tendit la main pour attraper la sienne. Il l’emmena donc près du lieu indiqué. Il n’avait pas eu de réponse car il n’en avait pas voulu. Andrew avait remarqué la manière spéciale qu’elle avait de regarder ce spectacle que les jeunes créaient involontairement. Elle les regardait avec les yeux brillants, preuve que ça l’intéressait.
Andrew arriva avec elle sur le lieu-dit, et la regarda d’un air malicieux avant de lui dire, devant un peu crier pour qu’ils s’entendent :

-Va s’y, je sais que tu aimes danser, tu es des Cygnes après tout !

Il lui décocha même un clin d’œil avant de lâcher sa main. Il la poussa délicatement vers les jeunes en leur faisant signe qu’elle allait participer. Et pendant qu’il l’observait il ne lâchait pas ce sourire d’amusement de ses lèvres. La voir s’amuser était ce qui comptait après tout. Et il restait là pour elle. Au cas où un autre homme bourré veuille de nouveau l’approcher ou quelque chose du genre. Et c’était aussi une forme de soutien. Car soutenir est une chose merveilleuse à ses yeux bruns.

Nos yeux se rencontrèrent alors qu'il réfléchissait à ma question. Elle ne devait pas souvent lui être posée. Après tout les personnes se fichent de vos principes s'ils n'en n'ont pas, eux. J'attendais sa réponse patiemment, remettant un pli de ma robe.

-Eh bien… C’est assez compliqué. Je suis d’une famille de haute bourgeoisie, tu imagines le genre. On m’a implanté dans le cerveau le « pourquoi du comment » se comporter envers telle ou telle personne.

S'arrêtant et recommandant en soda au barman, je savourais ses paroles. Moi aussi je venais d'une famille de haute bourgeoisie anglaise et je connais un peu toute l'étiquette que l'on nous implante dans le cerveau dès que nous sommes jeunes afin d'être bien vus de la haute société. Lorsque j'étais petite j'avais des réunions avec des gens de l'entourages de mes parents et ceux là me cherchaient déjà un peu parti anglais. Nous ne sommes plus au Moyen Age maintenant.

"-Par exemple, avec une fille c’est encore plus bordélique que quand je suis avec un gars. Je suis censé ne pas l’embrasser avant d’être sûr d’avoir des sentiments, être sympathique au moins à la rencontre, et même si je ne l’aime pas d’ailleurs, mais être sympa quand je n’apprécie pas la personne, je ne respecte pas. Tout comme le principe de parler comme la famille parle, c’est-à-dire à la façon du Moyen-Âge. Or, je ne le fais pas. Je ne l’ai jamais fait en réalité, c’est trop barbant et ça emmène les gens à nous détester."

Alors cela veut peut être dire qu'il ne m'apprécie pas mais respecte juste son étiquette et les principes de sa famille et de sa patrie. Cette pensée m'attrista quelque peu, mais je souris tout de même. Parler de façon moyennageuse est très instructif, mais juste avec la famille. Parce que avec nos amis nous 'avons l'air de rien à parler comme si nous n'étions pas de leur siècle. Andrew scruta la pièce, je continuais de fixer quelques instants la battle de danse avant de reposer mon regard vert dans le sien. Il avait de beaux yeux marrons aux éclats rougis par la lumière lorsqu'il détournait le regard.

"-Je te vois regarder les gens faire des battles là-bas, t’as envie d’y aller ?"

Je souris, alors il avait suivi mon regard. Je regardais mes pieds confuses. Selon mes principes à moi, je suis sensée m'intéresser à ce que l'on me raconte, même si cela m'ennuie et je ne dois pas quitter la personne des yeux, sauf si cette personne est plus puissante que moi dans la hiérarchie. Je le regardais désormais les yeux brillants d'un désir innaccompli, car j'avais un peu peur d'y aller seul au milieu de tous ces hommes. Il me tendit une main que je pris avant de nous diriger vers l'endroit où se tenaient tous ces garçons âgés entre dix huit et vingt ans. J'esquissais un sourire gêné, je n'avais que dix sept ans et je n'étais même pas sensée être ici. Je regardais Andrew, n'osant lâcher sa main protectrice. Il me jeta un sourire malicieux et un regard chaleureux avant de dire, haussant la voix pour que je le comprenne dans le brouhaha de la danse.

-Va s’y, je sais que tu aimes danser, tu es des Cygnes après tout !

Je le regardais une dernière fois avant d'avancer au milieu du cercle qui s'était formé. Dégageant poliment celui qui se trouvait là avant moi, j'exécutais quelques figures rapides que j'aimais bien et qui étaient un peu complexes. Je terminais par un salto arrière et retombais sur mes pieds, auprès d'Andrew. Je souriais et les hommes me regardaient en se demandant comment une jeune demoiselle pouvait faire cela. Tournant les talons, je pris la main du garçon avant de reprendre le calme de ma place, et mon verre de limonade sucrée mélangée à de la pêche avec une rondelle de citron sur le bord. Chose que je ne mangeais jamais mais que j'aimais avoir juste pour l'esthétique du verre.

Il la regardait. Ses mouvements paraissaient faciles alors qu’ils étaient compliqués, les regards étaient tournés vers elle, mais Andrew avait réussi à rester au premier rang. Il ne cessa de sourire en voyant ça. Cette fille, c’était la vie, la jeunesse et la beauté incarnée. Une déesse peut-être ? Non, Le jeune homme n’avait jamais cru en tout cela. Il l’observait avec tant de passion… qu’il ne se rendit même pas compte qu’il perdait le contrôle de lui-même. En effet, Anna fit un magnifique salto avant de se retrouver face à Andrew, très près même puisqu’il s’était légèrement avancé pour poser ses mains sur ses hanches. Il souriait. Il se fichait des regards autour d’eux, il se fichait que les gens la regardaient –et surtout les garçons- puisqu’il savait qu’il avait déjà tout gagné. Mais il s’empêcha de l’embrasser alors qu’ils se connaissaient à peine. Il lui déposa un baiser sur le front et lui souffla un « bravo ».

Anna en profita pour se saisir de la main ainsi que de le ramener où ils s’étaient assis auparavant. Andrew était un peu sonné de tout ce qui venait de se passer. Il ne pensait pas un jour rencontrer quelqu’un qui avait un tel caractère de danse. Précis, joli, et tout ce qui se rapporte à la perfection, ou presque.

En la regardant regarder son verre il s’arracha un sourire et tourna son regard vers la foule. Son meilleur ami et la brunette qui étaient en train de danser n’y étaient plus. *Sûrement ensemble cachés, quel con ce mec.* grogna-t-il dans sa tête. Mais au fond, il aurait aimé être comme Joe. Il aurait souhaité avoir la liberté de draguer et d’embrasser juste pour le fun. Il ne ressemblait en aucun cas aux autres jeunes qui se droguaient et buvaient pour rien, en allant ensuite coucher avec leurs proies.

Soudainement ses pieds le firent se lever, et sa main pris celle d’Anna. Il l’emmena ensuite à travers la foule et se dirigeait vers la sortie sans la lâcher. Son autre main tapotait nerveusement sa propre cuisse. Il allait un peu trop vite, au point que quand il s’arrêta brusquement, il senti le frêle corps de la jeune fille le heurter. Ce mouvement était dû au fait que ses pieds avaient vu son ami et l’inconnue en train de fricoter. Il ne resta pas un instant de plus dans le coin et emmena la fille avec lui, sur un banc qui était un peu trop à l’arrière du bâtiment. Mais ça ne le dérangeait pas, après tout il avait besoin de fumer plus que tout en ce moment-même. D’ailleurs il lâcha la belle pour la laisser s’installer et se plaça à côté avant de sortir une cigarette et de la porter promptement à sa bouche. Il chercha de sa main le briquet qui était dans sa poche et alluma la clope, avant de ranger de nouveau le feu.

Sans regarder Anna, il tira une bouché et souffla la fumée de son côté gauche, où la jeune fille n’y était pas. Il lança une nouvelle conversation.

-Excuse-moi de ne pas avoir prévenu, mais j’avais besoin de fumer… Et au moins la musique est moins forte et on a pas besoin de crier pour s’entendre parler.

Il lança un léger sourire et la regarda, ou du moins essaya. Il n’avait pas pensé à ça, au fait qu’il y ai peu de lumière ici. Perturbé par cette pensée il saisit son téléphone portable pour allumer l’application de la lampe de poche. Aussitôt l’écran émit une lumière forte mais pas trop et blanche. Il posa le portable sur ses genoux et tira une autre bouchée de cigarette. Ce n’est pas que ça le détendait, mais presque. Il avait souvent l’habitude d’être avec une fille, au milieu d’une troupe de gens, et non l’habitude d’être avec l’une d’entre elle loin de tout signe de vie, ou le plus éloigné possible.

Anna laissa les mains d'Andrew se placer sur ses hanches avant de recevoir un baiser sur le front. Elle sourit. Alors qu'ils étaient revenus à leur place initiale, Andrew attrapa vivement la main d'Anna, d'une fermeté dont il n'avait encore pas usé jusque là avec la jeune demoiselle. Les deux jeunes gens traversèrent rapidement la foule, se dirigeant vers un coin quelque peu sale et insalubre. Anna se demanda ce que faisait Andrew pour ne pas la prévenir d'où ils allaient. Pour cela la jeune fille avait bien compris, elle savait qu'il n'irait pas sur la piste de danse se déhancher ou quoi que ce soit. Le jeune garçon n'avait pas l'air d'être un fêtard qui passe ses soirées en boite de nuit.

Andrew changea de direction lorsqu'ils croisèrent deux jeunes gens assis sur un banc et qui s'embrassaient langoureusement, ces deux personnes n'étaient autre que la meilleure amie d'Anna et un garçon que son interlocuteur semblait connaitre car c'était le même que celui à qui il avait failli démonter la mâchoire quelques minutes plus tôt. Ils trouvèrent un petit coin un peu plus loin de la piste, et la musique était moins forte à cet endroit là. Il tapotait nerveusement sa poche droite. Extirpant de son pantalon noir un paquet de cigarette, il appuya sur la pression et une petite flamme illumina le haut du briquet qu'il tenait dans l'autre main. Il alluma la cigarette et la porta prompteusement à ses lèvres. Inspirant, il laissa la fumer pénétrer dans sa bouche avant de détourner la tête pour la recracher de l'autre côté. Il sembla soulagé et avait lâché le bras d'Anna qui e regardait faire sans rien dire.

-Excuse-moi de ne pas avoir prévenu, mais j’avais besoin de fumer… Et au moins la musique est moins forte et on a pas besoin de crier pour s’entendre parler.

Disant cela, il sortit de un téléphone qu'il mis en version lampe de poche pour éclairer l'endroit lugubre et sombre dans lequel ils étaient. Il déposa l'engin et Anna se souvint qu'elle n'avait pas emporté le sien car elle n'avait aucune poche dans sa robe et n'avait pas voulu se balader avec un sac en boite de nuit. La jeune demoiselle regarda la fumée grise s'évaporer. Elle ne fumait pas tous les jours mais seulement en soirée et lorsqu'on lui proposait, autrement elle n'en voyait pas l'utilité, ni celle d'acheter des paquets de cigarettes. La jeune fille écoutait la musique qui leur parvenait plus faiblement. Elle regarda Andrew fumer sa clope tranquillement et croisa ses jambes en passant dignement un genoux par dessus l'autre. Anna se leva précipitamment et attrapa la main d'Andrew, elle se dirigea un peu à l'écart de la piste, se plaça en face du jeune homme et passa ses mains autour de son cou. Elle sourit et dit :

"-La danse fait partie de ma vie, je ne peux supporter d'être loin d'elle longtemps."

Disant cela, elle se laissa bercer par le son pour une fois calme de la musique. Elle se demanda ce qu'il était arrivé au DJ pour mettre une musique si calme qui aurait du faire fuir les trois quarts des gens qui se situaient sur la piste, alors qu'au contraire les gens n'en revenaient que plus nombreux, chaque garçon accompagné d'une demoiselle qu'il ne devait même pas connaitre. Elle tenta d'apercevoir une de ses amies mais n'en reconnue aucune. *Surement dans un petit coin de la boite ou même dehors avec un garçon* Se dit elle. Elle rit intérieurement, ces filles étaient vraiment irrécupérable.

Anna semblait plongée dans la musique fredonnée au loin, elle bougeait inconsciemment la tête au rythme de la musique, et Andrew qui fumait tout en la regardant arracha un sourire, révélant ses dents parfaitement blanches. Il passa une main dans ses cheveux pour se recoiffer et d’un coup, il l’observa se lever alors que leurs regards se croisaient. « Que fait-elle ?! » pensa-t-il, inquiet. Mais il fut rassuré lorsque leurs doigts s’entremêlaient. Il en eut même quelques frissons dans le dos, et tira un léger sourire. Ils furent bientôt l’un contre l’autre en position de danse. Et Andrew avait encore sa cigarette dans la bouche mais il ne l’enleva pas, trouvant que ça pourrait le rendre sexy et très désirable, et lorsqu’elle passa ses bras autour de son cou il fit tout pour paraître détendu, étant gêné alors que ceci arrivait rarement. Il posa ses mains tremblantes sur la table de la jeune blondinette, qu’il ne cessait pas de trouver charmante et il ne se lassait pas de la regarder. Sa voix lui paraissait parfaite également :

"-La danse fait partie de ma vie, je ne peux supporter d'être loin d'elle longtemps."

Il lâcha de nouveau un sourire et sous le son doux de cette mélodie il se mit à valser tout doucement en la regardant.

-Eh bien moi, la musique fait partie de ma vie, ces deux choses s’assemblent parfaitement !

Il lâcha un rire amusé et lui fit un clin d’œil, la clope toujours pincée entre ses lèvres. Il y avait des tas de gens qui devaient danser à l’intérieur, et eux, ils étaient dehors. De plus que le cœur d’Andrew ne cessait pas de battre de plus en plus fort, le rendant stressé. Il n’avait pas l’habitude d’être dans ce genre de situation, mais il savait que bientôt ça s’arrangerait, oui, bientôt il pourrait se sentir mieux en lui parlant, il en était sûr.

Il continuait de rester près d’elle, dansant avec elle. Il espérait danser bien, car ça le dérangeait beaucoup de danser comme un pied alors qu’une Cygne était avec lui. Il aurait certainement la honte de sa vie.

Il continuait de savourer la musique, et termina la cigarette en la laissant tomber au sol et l’écrasa. Cette chanson il la connaissait si bien, qu’il aurait pu la chanter et dire les notes les yeux fermés. Puis elle se termina, et il fit doucement basculer en arrière Anna, se retrouvant encore plus près d’elle. Mais il la releva, voyant qu’elle touchait presque le sol à cause d’un faux mouvement de sa place. Il se gratta la nuque, embarrassé et dit :

-Excuses-moi, je suis plutôt du genre maladroit...

Et il la lâcha pour retourner s’asseoir sur le banc, lui tendant la main pour qu’elle vienne se caler près de lui, mais pas trop non plus voulait-il. Il s’imaginait déjà… Il s’imaginait déjà devoir abandonner cette scène pour rentrer à l’Académie. Il ne voulait pas, mais son pote après avoir fait des affaires avec la brune de tout à l’heure reviendrait sûrement le voir pour qu’ils rentrent alors qu’il est complètement sale et bourré sûrement. Andrew regrettait d’un côté de ne pas être comme son meilleur ami, mais il était bien aussi comme si était. Après tout l’idée de faire mal à une fille de cette manière le rendait fou de rage. Il sert le poing sur sa cuisse et jeta un coup d’œil au loin. Finalement ses yeux revinrent se poser sur la jolie blonde et il se calma presque aussitôt.

Andrew sourit, dévoilant une lignée de dents parfaites, d'une blancheur digne des stars. Sa clope entre les dents, avec les lèvres semi pincée attiraient. Elles donnaient envie de les embrasser, idée qu'Anna chassa bien loin de son esprit. Comment pouvait elle ne serait ce que pensée une chose pareille. Le garçon se mit à valser après avoir posé ses mains tremblottantes sur les hanches de la demoiselle. La jeune blonde esquissa un sourire narquois devant ce beau gars qui tentait tant bien que mal de faire quelques pas de danses, et qui ne se révélait pas si mauvais que ça en fin de compte.

-Eh bien moi, la musique fait partie de ma vie, ces deux choses s’assemblent parfaitement !

Sa phrase vint se caler presque directement derrière celle d'Anna, et l'on aurait pu dire qu'elles allaient parfaitement ensemble et qu'elles avaient été choisis tout spécialement. Leurs regards se croisèrent et la jeune danseuse ne pu s'empêcher de réprimer le rouge qui montait à ses joues. Elle se laissa porter par la lointaine mélodie, n'écoutant rien d'autre.

Le mégot tomba à ses pieds, le garçon l'écrasa d'un mouvement de la chaussure. Anna sourit, sans sa cigarette il paraissait être différent, pourtant c'était le même... Lorsque la musique s'arrêta et se perdit dans le lointain, le garçon se pencha en avant et Anna se courba pour sa pause finale répétée et rerépétée tant de fois par la professeure de danse. Le seul inconvénient était que le garçon avait placé ses pieds trop près, c'est pourquoi la jeune fille touchait presque le sol. Leurs deux corps étaient si près qu'on aurait pu croire qu'ils se touchaient, et Anna sentait le souffle d'Andrew dans son cou. Sa respiration calme et posée lui inspira une grande sérénité et la jeune fille retrouva son aplomb. Le garçon se gratta la nuque, visiblement gênée de son loupé de danse.

-Excuses-moi, je suis plutôt du genre maladroit...

Anna sourit, son "sauveur" comme elle pouvait l'appeler, retourna s'assoir sur un banc et lui tendit la main pour qu'elle vienne s'installer à côté de lui. Sans se faire prier, la blonde vint se caler près de lui et regarda les toits de la ville au dessus d'eux. Là maintenant, elle ne voulait qu'une chose, se blottir contre lui et s'endormir, que ce moment dure toujours. Anna ne comprenait pas ce qui lui arrivait, elle savait qu'elle n'était pas amoureuse d'Andrew, elle ne le connaissait pas assez pour l'être, pourtant elle ressentait comme une attirance autre que physique pour ce beau gosse au regard charmeur.

"-T'es pas maladroit, c'est juste que t'es pas un Cygne, et encore tu te débrouilles bien."

Répliqua la jeune fille en resongeant à la passe de tout à l'heure. Heureusement qu'il ne l'avait pas lâché sinon elle se serait écrasée pitoyablement sur le sol goudronneux. Et, assez rancunière pour ce genre d'humiliation, n'aurait plus jamais reparlé à cet homme qui lui aurait fait subir cette honte. Et quelque part, elle se demanda si elle l'aurait fait ou si le fait qu'il lui semblait différent des autres allait l'emporter. Les questions fusionnent dans sa tête comme les idées que peuvent avoir les écrivains. Peut être la mort de sa mère et ses recherches vaines pour comprendre quelques chose à son destin tragique y étaient pour quelque chose. Quoi qu'il en soit, la jeune fille savait que les trois quarts des questions qu'elles se posaient étaient sans réponses, ou tout du moins pour l'instant.

Il s’étonna lui-même de regarder les lèvres d’Anna plutôt que ses yeux. En fait, peut-être que ses pupilles divaguaient de ses yeux à sa bouche qui parlait lentement, ou plutôt rapidement, il n’en savait rien. Tellement perdu dans ses songes, il n’avait pas vraiment entendu ce qu’elle disait. Mais peu importe, en ce moment précis il était certainement l’homme le plus heureux du monde, et ses lèvres souriantes le trahissaient, il ne pouvait pas le cacher. Puis, ce fut comme un coup reçu sur la tête. Il la vit frémir, perdue dans ses pensées à son tour. Il passa délicatement sa main dans le creux de son dos pour qu’elle le regarde.

-Ça va ? Tu trembles un peu, as-tu froid ? lança-t-il, une moue un peu déçue sur le visage, à cette idée de déjà la ramener.

Le Beethoven se leva presque aussitôt, et au moment où il voulait reprendre la parole une voix au loin, déformée et saoule, l’insulta de tous les noms pour attirer son attention. Une grimace s’étira sur les lèvres de Andrew, qui se retourna et se résigna à prendre la main d’Anna pour l’aider à se relever, comme il le souhait au départ. Il croisa les bras sur sa poitrine, soupira un grand coup et laissa la silhouette tituber jusqu’à lui, ou plutôt, le dépasser, sans qu’il ne réagisse aussitôt. Ses pieds le tournèrent vers son pote, qui s’approchait d’Anna avec un sourire pervers aux lèvres.

Andrew se surprit à grogner et s’élança presque aussitôt pour rattraper Joe avant qu’il ne s’écroule sur le banc, près de la jeune Cygne.

-Boooah ! Et… Euh…

Le garçon bourré lâcha un rot dégoûtant qui lui valut une belle baffe dans la mâchoire, de la part du grand brun. Celui-ci l’attrapa vulgairement et le poussa loin du banc en lui hurlant de partir aussi vite qu’il était arrivé.

Comme prévu, son meilleur ami ricana et s’élança vers lui pour l’assommer de coups. Andrew ne chercha pas à esquiver. Il n’avait pas la force ni le courage, bien que ce détail puisse détruire toute chance de reparler à la jolie blonde. Il refusait de frapper son meilleur ami alors qu’il était bourré. Le lendemain, celui-ci oublierait ses gestes et le jeune homme, le Beethoven, ferait comme si ce n’était jamais arrivé. Il avait pris l’habitude de se défendre, mais là, c’était bien au-dessus de ses moyens. Il lâcha un soupira exaspéré, et son ami commençait à pleurer en cessant lâchement les vilains coups. L’alcool s’était tellement emparé de son corps qu’il n’agissait plus à son aise.

Le brun s’accroupit à côté du garçon qui s’était écroulé au sol, et le secoua un peu en lui grognant de revenir à la raison. Mais Joe souriait bêtement, les larmes coulant sur ses joues. Il ne tourna pas même la tête vers Anna, parce que son visage commençait à saigner légèrement. Il attrapa son meilleur ami et le releva, le laissant passer son bras autour de sa taille pour s’appuya. Cependant, And’ sorti un mouchoir de sa poche pour s’essuyer le visage, histoire de ne pas effrayer la belle. D’ailleurs, pour la rassurer il lança :
-Excuses-moi, il a un peu trop bu, comme toujours…

Soudainement, on entendit un briquet. A demi tourné vers la blonde pour allumer sa nouvelle cigarette, celle-ci pouvait sans mal voir les contours du visage du garçon, grâce à la faible lueur émise seulement quelques secondes. Au même moment, Joe toussa fortement, crachant au sol. Le « beau gosse », encore avec toute sa conscience, fit barrière de cette vision à la jeune Cygne. Celle soirée était en train de tomber à l’eau, comme toujours avec Joe. Mais ce n’était pas pour autant qu’il allait aider celui-ci, au contraire, quoi qu’il puisse lui arriver il serait toujours avec lui, parce qu’au fond, ils étaient comme deux frères. Joe lança faiblement, en marmonnant presque à son ami :

-Dés… olé ! J’ai effrayé… Ta copine je pense… Bouaah… Eeeehein ?

Un silence s’abattu soudain, se révélant inquiétant dans la nuit bleue.

Anna se demandait si, perdu dans ses pensée lointaines, Andrew l'avait entendu. Elle se conforta un peu en se disant que si son compliment était passé outre, ce n'était pas la chose des plus capitales qui fut laissée de côté. Fremissant quelque peu, elle sentit la main du garçon passer dans son dos et réprima un frisson. Bizarrement, cette sensation ne lui déplaisait pas, elle ne trouvait pas ce geste, déplacée, de la part du jeune Beethoven. Andrew lui demanda immédiatement si elle avait froid, elle avait du la voir trembler quelque peu. Un peu plus et la jeune blonde aurait souris. Peut être le fait qu'il se lève brusquement lui fit changer d'avis, et peut être que la venue, surprise, de son ami, qu'elle avait reconnu, avait brisé ce moment calme et paisible. En effet, le garçon, encore plus bourré que tout à l'heure, et semblant avoir lâché la fille sur qui il avait mis le grappin, se dirigeait vers les deux jeunes d'un pas hésitant, tibutant, et marchant de travers.

La jeune fille sentit que le regard porté par l'inconnu était quelque peu insistant. Il dépassa Andrew sans même sembler remarquer sa présence et vint s'assoir, si l'on puis dire, à côté de la danseuse. Cette dernière recula quelque peu et vint se heurter au dossier du banc. Il marmonnait des paroles tellement incompréhensible qu'elle se demandait si les mots sortaient vraiment d'une langue quelconque. Si cela ne tenait qu'à elle, elle vous passerait tous les détails qui suivirent, mais heureusement pour vous, c'est moi qui vous conte cette histoire. L'homme rota vulgairement au nez de la jeune fille. Il faut savoir que, pendant ce temps, l'Andrew interloqué avait reprit ses esprits et s'apprêtait déjà à retirer son amie des griffes de son pote. Il s'avança rapidement et les rejoint en quelques pas avant d'envoyer sa main sur la joue de son pote en une claque magistrale. L'envoyant promener assez loin, le brun marmonna quelque chose qu'Anna n'entendit pas, mais qui semblait se référer à des certaines menaces, ou à des ordres. Mais, plutôt tenace, l'autre revint encore. Mais cette fois il s'en prit à Andrew.

C'était peut être un jeu pour lui, mais le brun ne se défendait pas, et s'il ne faisait rien, il allait s'en souvenir de cette soirée. Anna réprima une grimace en voyant qu'il se laissait ruer de coups sans rien faire, sans rien dire. Mais bon, son ami était bourré, ce qu'il faisait n'était pas intentionnel. Mais tout de même, c'est comme si quelqu'un vous assassine en étant bourré et qu'on raconte à votre famille, il était bourré il se maitrisait pas, c'était pas le but recherché. Vous croyez que la famille va réagir comment ? En tout cas elle ne va pas vous dire : Ah, bon bah alors c'est pas grave on oublie tout ça d'accords ? Au bout de quelques minutes, l'homme saoul lâche Andrew et commença à pleurer tout en se lamentant. Anna n'avait envie de lui dire qu'une seule chose : * Faut pas boire quand on tient pas l'alcool ! *Mais elle se retint, il valait mieux pas énerver une personne bourrée.

Après s'être accroupis à ses côtés, tentant de lui faire reprendre raison, Andrew se leva, "leva son ami", et le laissa s'appuyer sur lui alors qu'il lançait à Anna qu'il avait trop bu, comme à son habitude. Anna avait déjà compris cela, ce qu'elle n'avait pas suivi c'était, si il sait qu'il fait des conneries lorsqu'il est bourré, pourquoi il boit toujours autant ? Ce gars est un simple crétin, c'est tout ce qu'il y a à dire. Et il a de la chance d'avoir un gars comme Andrew en guise d'ami, quelqu'un de rationnel qui ne passe pas sa soirée à boire et à se taper deux, trois filles ? Alors que l'un allumait une cigarette, l'autre était en train de vomir. Instinctivement peut être, le brun fit se plaça calmement devant son ami pour éviter une vision d'horreur à la jeune demoiselle. Celle-ci ne put s'empêcher d'être dégoutée par ce garçon. Il était peut être très gentil, mais boire jusqu'à aller vomir dans la rue est quelque chose de vraiment répugnant.

On entendit des petits hoquets, puis plus rien. C'est à ce moment là qu'Anna commença à être stressée. Et merde. Elle savait très bien ce que cela signifiait. On commençait par être bourré, puis on continuait de boire, ensuite on vomit, deux, trois fois, et ensuite on perds conscience. La jeune fille se leva d'un bond et retourna vers le gars, dépassant Andrew qui semblait pas avoir réagit. Elle se pencha au côté du garçon inconscient, baignant dans son vomi. Elle n'avait pas fait attention au fait qu'elle marchait elle même dans cette flaque de rendu, mais se fichait totalement de ses chaussures pour l'instant, en plus, sa robe ne risquait pas d'être abîmée, elle était trop courte pour toucher par terre, même accroupie.

"-Putain appelle les secours, ton pote nous fait un coma éthylique."

De toutes les fêtes auxquelles elle s'était rendue à Londres, Anna avait vu bien des fois des gens faire ce genre de choses. Les comas éthyliques, elle en avait vu tellement qu'elle ne pouvait pas se tromper. Elle s'en rendait compte au premier silence. Un bourré qui se tait c'est pas normal, il est sensé parler et grogner, même marmonner, mais le silence total c'est impossible. En général, la blonde évitait les insultes, mais là elle se mit à jurer comme pas possible, et je vous passerais, pour cette fois, les détails de l'affaire. En levant les yeux, Anna vit la peur qui se lisait sur le visage d'Andrew. Après avoir fait tout ce qu'elle pouvait pour Joe (oui en fait moi, narrateur, je connais son nom), soit le sortir de son vomi, l'allonger en PLS, la position latérale de sécurité, le couvrir pour ne pas qu'il se refroidisse, et vérifier s'il respirait correctement, la jeune fille se redressa et regarda Andrew :

"-On peut rien faire de plus, faut attendre."

Heureusement que la danseuse avait écouté lorsqu'elle était jeune, les conseils que lui prodiguaient toujours sa nourrice, sur la sécurité et les comportements à risques, avec ce qu'il faut faire pour chaque cas. La danseuse s'approcha du garçon, il semblait choqué de savoir que son pote était en danger de mort. Elle prit sa main dans la sienne pour le rassurer.

"-On a fait tout de qu'on a pu, il va s'en sortir, j'en suis sure, les secours vont arriver."

Elle esquissa un demi sourire et relâcha la main du garçon, d'où émanait une chaleur rassurante.

Andrew se tourna presque aussitôt, surpris de ne plus entendre Joe. Le garçon était au sol, saoul, les yeux clos, nageant presque dans son vomi. Ne sachant pas quoi faire, paniquant. Il ne savait pas quoi faire, car c’était la première fois qu’il voyait ceci. Jamais il n’avait connu des cas en train de tomber dans le coma à cause de l’alcool. La vue du corps de Joe allongé sur le sol, inanimé lui donnait des frissons dans le dos. Mais il n’eut pas vraiment le temps de réfléchir. En effet, la blonde était déjà en train de réagir, comme si c’était une infirmière, comme si elle avait fait ça toute sa vie de voir des âmes torturées. Il la regardait, sans rien dire. Son teint devint rapidement livide lorsqu’elle lui prit la main pour le rassurer. Il tourna aussitôt la tête, gêné.

Il refusait de penser ce qu’il pensait. Il n’aurait pas été éduqué ainsi il lui aurait peut-être déjà volé un ou deux baisers avant de disparaître dans la nuit sombre. Il en avait même oublié de l’écouter, tellement plongé dans ses pensées. Il s’imaginait autrement, il s’imaginait élevé par une autre famille. Dans ce cas, il serait venu de son plein gré en boîte de nuit. En train de boire et de danser, avec les autres, il n’aurait pas vu l’agresseur d’Anna. Il aurait donc flirté avec une autre fille, il n’aurait jamais rencontré la blonde qui lui tenait la main. Il n’aurait même pas remarqué sa présence à l’académie, trop préoccupé à regarder les fesses des filles avec ses potes, comme tous les garçons le font. Il trembla, et tourna de nouveau la tête vers la fille qui lui tenait la main. Son pouls s’accélérait, jusqu’à ce qu’il reprenne lentement ses esprits en entendant les pompiers arriver. Il serra subitement la main de « l’inconnue », fixant les pompiers embraquer son ami.

L’un deux s’approcha des deux jeunes, alors qu’Andrew ne captait qu’à moitié ce qu’ils demandaient. Il lâcha Anna, et se mit à courir, jusqu’à disparaître dans la nuit derrière la discothèque. Il s’adossa au mur, balança la cigarette par terre pour l’écraser. Et il se mit à chuchoter des paroles qui étaient insignifiantes.

-Mais qu’est-ce que je fais ? Pourquoi ça m’arrive à moi ? Je ne suis finalement qu’un incapable, c’est ça ? Cette vie ne me correspond pas, je ne suis pas comme ça, pas comme je le suis ce soir… Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? Je ne pouvais en sauver qu’un des deux, c’est ça ? Soit mon rêve, soit mon ami, et j’ai choisi mon rêve parce qu’on m’a dit « Petit, suis tes rêves avant tout ».

Il se mit à soupirer, passant la main dans ses cheveux bruns. Il ferma les yeux et tomba assis sur le sol. Il poussa un grognement de mécontentement. Il l’avait même laissé devant le pompier. Il s’en voulait d’avoir fui comme un lâche. Qui aurait envie d’un lâche ? Il commençait même à penser qu’il devait abandonner. Abandonner de chercher à la connaître, abandonner ses amis pour être enfin seul. Pourtant, quelque chose au fond de lui, comme une braise qui cherchait à être allumée lui disait de ne pas tout quitter.

Parfois les êtres sont étranges, et aujourd'hui, c'était le garçon qui se tenait devant la danseuse qui l'était. Alors que la sirène des pompiers retentit au loin, et que le camion rouge s'approcha, il déguerpi à toute vitesse pour aller elle ne savait où. Peut être avait il peur ? Mais peur de quoi ? Peur qu'on pense qu'il était responsable ? Joe et le seul responsable. Lorsque l'homme sortit du camion, il s'étonna de ne trouver qu'une jeune fille seule et désemparée, auprès de ce qui aurait bien pu être un cadavre sans intervention rapide. Les deux "adultes" discutèrent quelques instants, l'homme posait beaucoup de questions, et la blonde tentait d'y répondre tant bien que mal. Pourtant, son esprit était ailleurs, elle se fichait pas mal de Joe, la personne qui l'intéressait était partie en courant. Enfin, elle ne savait pas ce qu'elle trouvait à ce Beethoven, une ressemblance ? Le fait d'être similaire dans leurs habitudes ? Elle ne savait pas. Pourtant, il avait fui, laissant la jeune fille seule avec un mec bourré dans le coma et des pompiers sur les bras.

Anna, quant à elle, resta auprès du garçon jusqu'à ce que les secours lui disent qu'elle pouvait y aller. L'homme lui proposa de monter dans le camion pour se rendre à l'hôpital, elle déclina en s'empourprant. De toute évidence il avait pensé que les deux jeunes gens se fréquentait de plus près que la normale. Anna attendit que les pompiers disparaissent au coin de la rue pour chercher Andrew. Ce garçon avait une fâcheuse tendance à partir à l'improviste. Pourtant, elle ne savait pas pourquoi, il semblait perdu, perturbé dans ce monde de buveurs et de dragueuses qui faisaient tourner la tête de tout homme normal. Anna le comprenait, elle avait l'habitude d'être trainée dans ces endroits insalubres et aussi d'en ressortir sobre alors que tous les autres étaient bourré. En un an, une seule chose avait attirée la jeune fille en soirée : fumer. Sinon elle ne l'aurait jamais fait, pourtant les cigarettes la détendait plus que tout.

D'un pas léger, elle fit demi tour et se retrouva près de la boite de nuit. Un courant d'air la fit frissonner, ce n'est pas recommandé d'être seule à une heure si tardive, surtout pour une jeune fille de son âge. Anna retourna à l'intérieur et chercha, dans la pénombre, le visage angoissé d'Andrew. Pourtant elle ne le trouva pas. Mais bien sur, que savait elle de lui déjà ? Il était à l'académie, jouait d'un instrument à en déduire sa maison, fumait beaucoup à voir à qu'elle vitesse il s'était empressé d'allumer sa cigarette, il dansait aussi bien qu'un Cygne fait de la comédie et surtout, il n'aime pas les boites de nuit. Avec tant d'informations on retrouve un criminel, Anna, ressaisis-toi ! Tu à l'habitude des mystères, alors pourquoi tu n'arrives pas à décrypter un garçon mystérieux ?

La jeune demoiselle ressortit. Il n'était pas dedans, c'était sur, et même si elle n'avait pas très bien cherché, maintenant qu'elle avait ses hypothèses, elle en mettrait sa main au feu. Pourtant, selon toutes les apparences, le garçon n'était pas allé bien loin. Anna voyait mal comment il serait rentré sans être passé à l'hôpital. Elle en déduit donc qu'il poireautait dans un coin, à maudire son sort, à se maudire et à se dire, comme tout le monde dans cette situation, putain pourquoi moi, et pourquoi je l'ai pas empêché de boire, c'est ma faute... Comme le font toutes les personnes rationnelles et ayant du sens humain. Pourtant il n'était en rien responsable, et la jeune fille était bien décidée à lui faire comprendre cette importance capitale.

C'est alors, qu'assise sur le bord du trottoir, elle entendit un bruit sourd. Mhh les ruelles sont pas très fréquentables mais bon. La danseuse ne savait même pas où elle s'aventurait, mais elle s'en fichait, et si ce garçon commençait à avoir des tendances suicidaires avec ce poids sur la conscience ? Elle le trouva assit contre le mur de la discothèque, enfin, assit, c'est un bien grand mot, on aurait plutôt dit qu'il était affalé. S'accroupissant devant lui, elle le laissa déblatérer un flot de parole incompréhensible et ne comprit que les mots "sauver", "ami" et "rêve", ce dernier qu'il ne cessait de répéter.

“-T'en fais pas, c'est pas ta faute, tu pouvais pas savoir. Andrew regarde moi, ça va aller, tout va bien se passer.”

La jeune fille le força à la regarder et à relever la tête. Elle avait tenté de l'apaiser, comme le ferait tout ami. A ce moment elle avait l'impression d'être une mère disant à son fils que ça va aller et que son premier jour d'école se passera bien. D'ailleurs si un jour elle avait un fils aussi beau, elle en serait très fière. Ne sachant comment lui remonter le moral, elle s'assit à côté de lui, rapprocha ses genoux de son corps et passa ses bras autour. Quitte à attendre, autant être bien.

Andrew se redressa, surement blessé dans son orgueil que d'avoir été trouvé dans une telle posture, de plus par une jeune fille. Anna regardait le ciel mais sentait le regard du garçon posé sur elle. La blonde tourna ses yeux verts de son côté et sourit. Andrew se mit à observer les nuages qui peuplaient le ciel, et Anna le regardait. Il était adossé au mur, assis correctement, contrairement aux minutes précédentes, et tout son corps était tourné vers les cieux. Contemplait il les astres ou les nébuleux ? A quoi pensait il ? C'est alors qu'il se mit à parler.

Ces propos n'étaient pas clair. Anna ne savait pas de qui il parlait. D'une fille elle en était sure, mais de laquelle ? Sa soeur, sa meilleure amie, sa petite amie ? Il disait qu'il aurait voulu la connaître plus tôt, aller à sa rencontre, devenir son ami, discuter avec elle. Il disait aussi qu'il avait peur qu'il lui arrive quelque chose, qu'elle ait un quelconque problème avec des garçons. Il disait qu'il aimait la regarder se balader dans la cour, il disait qu'il n'avait jamais osé l'approcher. Il parlait de Joe. Son ami. Il parlait de toutes les choses qui ne seraient jamais arrivées s'il n'était pas venu en boîte de nuit, de comment il se serait senti en ce moment même. Et alors il prononça son nom.

Anna ne comprenait pas tout. Elle était un peu perdue, mais ne pouvait décrocher son regard du garçon. De ses cheveux et de ses courbes si bien dessinées, de sa posture un peu désinvolte, de son regard troublant. Anna le vit perdu dans ses pensées tandis ce qu'elle était dans les siennes. Le jeune homme jouait du violon et du piano. Deux instruments communs pour un enfant de bonne femme comme lui. La danseuse regarda ses mains. Pourquoi est ce qu'elle se trouvait ici elle ? Elle devrait être rentrée, depuis longtemps, avec ses amies, dans son dortoir, à les coucher en leur disant que ce n'est pas grave qu'elles aient tout oublié. Le brun dessina de ses doigts quelque chose dans le ciel, et ses traits se détendirent, son corps tout entier ressenti un soulagement et il se décontracta.

La jeune fille tressailli au contact de ses mains sur ses épaules. Elle sourit et croisa son regard. Dans les yeux de la blonde se lisait un remerciement silencieux. Le jeune homme venait de poser sa veste sur ses frêles épaules dénudées. Dans ce calme si présent il précipita sa main au fond de sa poche. Cigarettes. Conclue la jeune fille. Elle ne se trompa pas. La manière qu'il avait de s'emporter de la sorte, d'accélérer ses mouvements, les seules fois où il semblait le faire, étaient celles où il avait besoin de fumer.

Aimait elle les lettres ? Anna ne s'était jamais posée la question. Pourtant oui. Et dès qu'elle en ressentait le besoin, elle écrivait à sa mère, des lettres sur un papier jaunis, qu'elle gardait dans son placard, fermé à double tour dans un tiroir. Les lettres. Elles la reliaient à son père. Les lettres. Elles passaient là où il n'y avait pas de réseau. Les lettres. Elle les conservait dans une boîte. Les lettres. Toutes étaient rangées. Les lettres. Celles qu'elle voulait pour toujours auprès d'elle. Les lettres...

Il fumait désormais, et la fumée grisâtre s'échappait de sa bouche et s'élevait dans le ciel. Anna quant à elle, regarde devant elle le mur chargé de tags aux milles couleurs, seul éclat chaleureux dans cette ruelle sombre et lugubre. Sa cigarette se consumait entre ses lèvres, et bientôt elle ne serait plus qu'un morceau de papier et des cendres rejetées sur le sol. Comme la vie, elle est, se consume, et disparait. Mais chacune laisse sa trace. Dis toi ça Anna, sinon ta vie ne vaudra rien.

La cavalière regarda le jeune homme, de plus en plus intriguée par ses paroles. Elle aimerait recevoir des lettres de n'importe qui, qui pourrait être gentil avec lui et lui conter des choses drôles, la faire rire et sourire. Recevoir une lettre de quelqu'un à qui elle pourrait tenir, plus qu'à quiconque, recevoir une lettre de quelqu'un qui serait son ami et qui la comprendrait. Recevoir une lettre de son père, de Zachary, de Brume, de sa mère, d'Alison, de ses amis, et qui sait d'Andrew ?

"-J'aime beaucoup les lettres. Et j'aime aussi les écrire. Je pense que cela me ferait très plaisir."

Anna se souvenait des romans épistolaires, des relations épistolaires, de tout ces gens communiquant par le courrier, sans pouvoir avoir en face de lui l'autre, mais se le représenter. N'est ce pas formidable ? La jeune fille se redressa et se leva en essayant de dire:

"-Il se fait tard, nous devrions rentrer à l'académie tu ne penses pas ?"

Au lieu de ça elle lui sourit. Plus que tout elle aurait voulu rester ici, mais il commençait à se faire tard et trainer la nuit n'est pas une bonne idée. Bien qu'elle ne veuille par rentrer, Anna y était contrainte, après tout, elle devait veiller sur ses amies, elle devait rentrer pour vérifier si elles dormaient toutes, et si aucune n'était partie en ambulance comme Joe. L'amie de son mystérieux inconnu sauveteur qui était devenu Andrew celui qui aimait écrire les lettres.

"-J'imagine que tu aimes écrire les lettres."

Continua t-elle en pensant que quiconque aime écrire, ne peut que bien écrire. Elle frissonna mais ne cessa de sourire. Car grâce à Andrew sa soirée n'avait pas été un désastre, et elle ne s'était pas ennuyée dans son coin. Grâce à lui. Et peut être même voulait elle le revoir. Après les cours, ou tout simplement s'écrire.

Cher Andrew,

C'est drôle que tu me dises aimer les lettres, car moi aussi elles jalonnent mon quotidien. Peut être pourrions nous devenir amis tous les deux ? Pourquoi pas. Après tout nous semblons peu différents. Je pense pouvoir te dire de grandes choses, tu m'inspires confiance, et tu sais, c'est très rare. Un jour peut être tu sauras pourquoi. Peu de gens savent, peu de gens comprennent, mais je suis sûre que tu a la sensibilité pour.

J'ose espérer que mon petit message te plaira.
Anna.

Elle aurait pu écrire ça, elle pourrait l'écrire, s'il lui demandait de lui écrire, un toute petite lettre, même pas digne d'un enfant, mais pleine de vérité.