Laure arriva en trombe dans le dortoir, sa valise traînant derrière elle. Elle traversa la pièce et s'allongea habillée sur le lit. Elle avait envie de dormir, mais elle avait beaucoup de choses à faire en même temps. Elle descendit de son lit et s'approcha de sa valise. Elle sortit ses affaires avant de les fourrer dans l'armoire réservée aux élèves. Elle se mit en pyjama, sortit sa peluche - et oui, elle a 16 ans et elle ne peut pas dormir sans son nounours - avant de sauter sur son lit. Elle sortit du papier lettre bleu et un stylo-plume à encre vert émeraude, mit comme support un cahier de musique qui traînait là, et commença à écrire de son écriture penchée et appliquée :
« Ania,*
Tu me manques tellement ! Je suis arrivée à AA le 3 Septembre. J'aimerai être en Sibérie à tes côtés, mais j'ai fait mon choix et j'en suis assez contente. Ce n'est pas pour ça que je ne t'aime pas ! Malgré qu'on soit en hiver, ici, pour moi, il fait pas trop froid. Comparé aux hivers de Russie, il y a assez de marge. Pas pour autant qu »

Elle secoua son stylo-plume, essaya d'écrire avant de se rendre compte qu'il n'y avait plus d'encre. Elle chercha alors dans sa trousse des cartouches de secours. Malheureusement, et comme d'habitude, elle avait oublié quelque chose et le destin avait voulu que ça soit l'encre. Elle déposa le papier et se dirigea vers les armoires. Elle ouvrit doucement les battants et regarda à l'intérieur. Toute sorte de choses déposés au fil des années étaient répandus ici. Le ménage n'avait pas était fait depuis longtemps ou bien à moitié. Elle commença à chercher. Elle trouva un violon si vieux que le bois devenait vert à force d'humidité. Des stylos qui ne marchaient plus prenaient toute la place et, ironie du sort, il y avait des cartouches d'encre vides de partout. Elle referma alors l'armoire avec une moue dubitative.

Elle retourna à sa place, s'allongea sur son lit et commença à explorer le plafond. Quand on avait rien à faire, c'était intéressant de compter le nombre de planches de bois. Elle s'arracha à sa contemplation et se roula sur le côté afin de trouver le sommeil. Elle avait beau se retourner, elle ne trouvait pas le sommeil. Elle avait promit à Ania Armyanski, sa meilleure amie, de lui écrire une lettre le jour de son arrivée. Et la deuxième raison, la Sibérie lui manquait et une crise de larmes l'envahit comme à chaque rentrée. C'était comme une vague de froid en elle-même, un dragon crachant des glaces qui lui piquaient le coeur alors que de larmes, chaudes, lui tombaient des yeux et venaient tremper le lit en velours. Elle prit des mouchoirs de secours qu'elle avait toujours dans son sac et commença à s'essuyer les yeux. Déjà, les lampes s'éteignaient et tout le monde commençait à s'endormir ou lire un livre en attente du marchand de sable. Laure reprit le papier à lettre bleu.

« Quelqu'un aurait de l'encre pour un stylo-plume ? »

Elle voulait déjà se changer les idées en finissant la lettre pour Ania. Si la poste faisait vite, elle allait avoir sa réponse dans une - deux semaines. C'était long mais c'était comme ça. Et puis, elle pourrait envoyer des emails à partir de son ordinateur portable.