Une fine brise faisait trembler les rideaux blancs de la Salle de Musique. Un piano noir trônait là, et Laure caressa la surface lisse de l'objet. Le plancher grinçait à chaque pas. Le soleil perçait par les fenêtres et provoquait un halo autour du piano. Laure ferma les yeux et respira à fond. Des chandelles étaient posées sur les rebords de la fenêtre mais n'avait pas été encore allumées, cause du jour. Les oiseaux piaillaient et tout était beau, si parfait. Si gaie. Et elle... La peau blafarde, les yeux vides. Son coeur glacé. Elle ne ressemblait pas à la fille il y a quelques mois. C'était une autre personne. Mais tout cela allait passer bien vite. Ou en tout cas, elle l'espérait.

Elle traversa la pièce d'un pas léger et s'assit sur le tabouret assorti au piano. Elle commença à pianoter sur l'instrument, doucement, lentement, au rythme des battements de son coeur. Elle s'arrêta brusquement. Elle connaissait cette chanson par coeur, mais elle sortit de son sac en cuir les notes. La clé de sol semblait bouger au rythme de la chanson et les notes de musique semblait s'envoler par la fenêtre. Un bouquet de fleurs s'épanouissait dans un vase en verre.

« But there's a side to you that I never knew, never knew, all the things, you'd said, they were never true, never true... And the games, you'd play, you would always win, always win... But I set Fire... To the Rain.. Watched it pour as I touched your face..»

Elle s'arrêta de chanter et de jouer. Quelques larmes perlèrent sur ses yeux. Elle rangea ses affaires, ferma les rideaux, prit le vase en verre et jeta les fleurs par la fenêtre. Elles tombèrent par terre, comme de vulgaires chiffons. Une goutte d'eau tomba d'une pétale avant de s'écraser contre la terre sèche. Laure reposa le vase sur le piano. Les oiseaux arrêtèrent de chanter. Laure crut même que le monde s'arrêta de tourner à cette instant précis. Elle prit sur le piano la partition des notes de musique de "Set Fire to the Rain" d'Adele. Cette musique la définissait parfaitement à cette instant. Mais là, c'était fini. Elle déchira le papier et le jeta derrière elle. Les confettis volaient de partout, la mélodie s'envolait. Elle ramassa son sac. Éteignit la lumière. Pour la première fois de la journée, elle était calme. Sereine. Tranquille...